LE SOULOU
Il est peu connu sous ce nom. Demandez donc au pêcheur qui descend la côte de
Drulhs, il va pêcher dans
le ruisseau de Couzan, et celui qui a pris la route de Champs, s'arrête au ruisseau de
Cheyssac. Ce ruisseau, c'est le Soulou, qui, pour la majorité des gens de la commune change de nom et porte celui des villages traversés. Il prend sa source près de la roche de Grely à l’orée de la forêt domaniale
d'Algère. Il passe au sud de St-Etienne de Chomeil et faisait tourner autrefois les meules du Moulin de
Compié, il traverse la commune d'Antignac et actionnait, il n'y a pas si longtemps, les moulins de Sauronnet et de
Drulh. C'est après ce moulin qu'il est entièrement dans la commune. Il traverse
Cheyssac, là encore le moulin a cessé toute activité et se jette dans la Rhue près du "pont tremblant" après avoir traversé tout le "pays de la Daille".
Au siècle denier, l'exploitation minière de la région a amené l'installation de "Moulins à scie". Il en existait un à St-Thomas auquel fut greffé dans les années 1838-39, un petit haut fourneau. Le Soulou a servi à alimenter en eau cette installation. La prise d'eau était au nord de
Cheyssac, peu avant la séparation des lignes de chemin de fer Bort-Aurillac et
Bort-Neussargues.
De ce long canal, il reste encore des parties visibles (prendre le chemin qui longe la voie et conduit au Saut de la Saule, on peut voir sur la gauche une partie de ce canal). Le Soulou a fait le bonheur de générations de pêcheurs de truites et autrefois d'écrevisses aujourd'hui pratiquement disparues.
LE CHÂTEAU
Depuis quand existe-t-il un château dans la vallée du Soulou ? Il n'est pas impossible que le haut moyen-âge ait vu les premières constructions de l'ancêtre du château actuel (mais je n'ai rien trouvé dans les archives pour le confirmer).
Toutefois, la vallée du Soulou étant très fréquentée, c'était l'un des chemins pour aller de Bort vers
Riom-es-Montagnes, il n'est pas étonnant qu'une place forte ait été élevée pour surveiller, voire faire la police, dans ce secteur où circulaient les marchands mais aussi les bandes de brigands. Dans les siècles deniers, cette voie de circulation était encore utilisée. Il nous en reste un "témoin'', la maison de la Ganette qui était un relais de poste.
Il est possible d'envisager trois époques dans l'histoire du château de
Couzan.
AVANT LE XV° SIÈCLE
On ne sait rien de sa construction, peut-être une grande partie en bois, comme il était coutume à l'époque. C'était le chef-lieu d'une Baronnie. Une famille éteinte au
XV° siècle portait le nom de Couzan. En 1202, Magdeleine de Couzan a fondé une chapellerie à Bort. En 1280, on trouve le nom de Robert de Couzans dans une sentence rendue entre lui et le comtour de Saignes par le prieur du
Vignonnet. En 1397, Delphine de Couzans reconnaissait être vassal de Guillaume Comtour de Saignes (c'était
l'AVEU) portant sur le lieu de Couzans, les villages de la
Benetie, de la Ganette, de la Pestelie et de la Rodésie (villages aujourd'hui disparus). A cette époque, il est question du "Château Fort" de Couzans en partie ruiné. Delphine de Couzans et son mari Pierre de Gibiac vendirent la terre de Couzans en 1428 à Jean
d'Ydes dit d'Auteroche. La fin du 14° siècle fut particulièrement grave pour la région, les épidémies, le passage des armées régulières et les bandes de routiers avaient provoqué une diminution importante du peuplement.
DU XV° AU XIX° SIÈCLE
Suite à cette désastreuse fin de siècle, il s’en suivit une période de reconstruction au début du 15° siècle. C’est ainsi que se bâtirent et rebâtirent les châteaux
d'Auzers, de Chavagnac, du Châtelet, de Madic et de Couzans. Ce denier fut reconstruit en 1435 par Antoine de Curières héritier de Jean
d'Ydes d'Auteroche. Il consistait en une grosse tour carrée, construite sur un rocher, et flanquée de deux corps de logis qui formaient avec elle une cour fermée par un portail en fer que surmontait un corps de garde. Une chapelle reliait la tour principale avec les corps de logis. De ces constructions ne subsiste que la tour sur cinq niveaux dont une cave et un de défense. De ce dernier, on peut voir les corbeaux à triple
ressauts. Le parapet ciselé et le chemin de ronde n'existent plus.
Antoine de Currières d'Auteroche, denier mâle de ce nom, resté célibataire, donc sans postérité légitime, était père de six bâtards, auxquels il légua par testament en 1511 la moitié de la terre de Cheyssac. Par le même testament, il fit héritier de Couzans son neveu, Maurice de Chalus. Et c'est ainsi que la maison de Chalus arriva à Couzans où elle s'est maintenue jusqu'au 18 février 1765 date où cette terre passa à la famille de Fontange par le mariage d'Antoinette de Chalus avec Charles de Fontanges (lequel fut maire de Vebret de 1840 à 1848 et de 1848 à 1854). Leur petit-fils, le capitaine de Frégate Henri de Fontange, mort à Couzan en 1875 laisse deux filles qui se marient aux deux frères Roger et Max Vienot de Vaublanc. Mme Roger de Vaublanc reste attributaire de la terre de Couzan. Ce n'est là qu'une énumération très succincte des propriétaires de Couzan au cours de ces quatre siècles. Chose curieuse, l'héritage a rarement eu lieu en ligne directe par une descendance mâle.
Au 16° siècle, Couzan a été le théâtre de nombreux actes de violence.
L'histoire raconte qu'en 1536, Maurice du Chalus, seigneur de Couzan, était en mauvais termes avec les seigneurs de Chabannes et du Monestier. Ce dernier se rendit à Couzan à la tête d'une bande de brigands. Il envoya un des siens demander l'hospitalité pour la nuit, ce qui lui fut accordé. Introduit au château, il en ouvrit les portes et le seigneur de Monastier se saisit de Maurice de Chalus et de sa femme, et le poignard sur la gorge leur fit remettre l'argent en leur possession (10 000 écus, somme considérable à l'époque) et leur fit subir les plus odieux traitements. L 'affaire fut instruite par ordre du Roi et jugée à Bordeaux. Mais on ne sait pas quel sort a été réservé aux assaillants.
En 1590, le château fut pillé par une bande de malfaiteurs. En 1596, le vicomte de la Roche vint s'y établir par la force, y fit des dévastations considérables qu'il dut par la suite payer de ses deniers.
FIN DU XIX° SIÈCLE A NOS JOURS
C est en 1896 que M. Roger de Vaublanc estimant à juste titre qu’il était nécessaire de moderniser les installations datant du
15° siècle, entreprit la construction du château actuel, ne conservant que la tour carrée.
Il eût été intéressant de connaître quelques détails concernant cette construction, mais les propriétaires actuels de château n'ont rien en leur possession et c'est bien dommage. On sait simplement que l'architecte était un de Vaublanc et que cette réalisation aurait été son oeuvre la plus importante.
Le château comporte trois belles tours rondes dont l'une sert de donjon avec mâchicoulis. La chapelle qui autrefois reliait la tour carrée au corps du logis était incluse à l'intérieur du bâtiment. Une grande terrasse domine la vallée du
Soulou. Le nouveau château, logis et chapelle, est du "style troubadour".
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LES
ACTUELS PROPRIÉTAIRES
M. Roger de Vaublanc a été maire de la commune de 1896 à 1908. C'est au cours de son mandat que s'est effectué le transfert du cimetière qui entourait l'église vers son emplacement actuel.
M. et Mme de Vaublanc n'eurent pas d'enfant, et encore une fois, à la mort de M. Roger de Vaublanc, en 1929, la succession ne se fit pas en ligne directe. C’est son neveu M. Pierre de Vaublanc qui hérita de la terre de
Couzan. Son action dans la commune a été marquée, entre autre, par la création de l'Association des Anciens Combattants et la mise sur pied des coopératives laitières d'abord à
Couchal, puis à Saignes.
M. et Mme Pierre de Vaublanc eurent trois filles et deux garçons, la succession directe est assurée.
Le château a été inscrit à l'inventaire supplémentaire des Monuments Historiques en 1994. Il ne se visite pas.
LE VILLAGE
Il s'étire le long du chemin, en partant du portail d'entrée du château jusqu'à "la croz del
telh" sur le "couderc" où a été érigée une croix en bois (c'est une croix de mission), jadis entourée de deux tilleuls aujourd'hui disparus, d'où son nom. A l'entrée du village, il existe une très belle croix de granit qui est probablement contemporaine à la construction du château au 15° siècle.
L’EAU A COUZAN
Si vous prenez le chemin qui conduit de Couzan à Lavergne, vous trouverez sur votre droite un étang desséché qui était autrefois un vivier. Plus loin, avant d'attaquer la montée subsistent les ruines de l'un des deux moulins construits au 19° siècle, celui de droite était adossé à une importante chaussée qui était la retenue d'un vaste étang. Le "barrage" mesurait 40 mètres de long, 6 mètres de haut pour une épaisseur de 3 mètres. A la sortie de ce premier moulin, l'eau alimentait un deuxième étang pour faire tourner un autre moulin aujourd'hui disparu). Il se trouvait à gauche du chemin. En ce qui concerne l'alimentation en eau potable, il est bien évident que dans les temps anciens, seuls les puits étaient utilisés. A la fin du 19° siècle, des sources furent captées au "Pet de la Vergne" et au
"Radagnat", deux conduites avec "points de regards" pour le nettoyage amenaient l'eau au château. Une citerne était creusée dans le rocher au pied de la tour carrée, de là, partait un réseau d'alimentation : pour les parties basses du château, pour un abreuvoir adossé à un four aujourd'hui démoli et pour un lavoir avec son bassin circulaire et ses "pierres" pour les laveuses.
Aujourd'hui, le bassin est vide, le village est alimenté par l'eau du Marilhou et le progrès aidant les laveuses s'en sont allées.
BIBLIOGRAPHIE
- Bulletins du G.R.A.H.V.S. de vallée de la Sumène
- Dictionnaire topographique du Cantal (A. AME)
- Dictionnaire Statistique et historique du département du Cantal
(Deribier du Châtelet)
- Ecrits de M. Prangère
- L'Auvergne littéraire
Jean TOURNADRE (janvier 1996)
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