Les traces glaciaires aux alentours de Vebret |
|
Michel Bhaud
(15240 Vebret)
Michel
BHAUD est aussi le directeur de publication et un des auteurs
d'un site hébergé par "cybercantal"
nommé : « CANTAL : SCIENCE ET ENVIRONNEMENT » ou « FAIRE CONNAITRE ET EXPLIQUER » Adresse du site : http://geo.cybercantal.net/php/ |
action des glaciers dans cette zone daltitude relativement faible, nest pas reconnue par nos contemporains. On parle beaucoup plus du volcan de Chastel-Marlhac, du trachyte de Menet, du chicot basaltique de Saignes, des Orgues de Bort que des glaciers de la basse Sumène. Cependant de nombreux signes ne trompent pas : la vallée de la Sumène et spécialement sa partie moyenne qui intéresse notre commune, présente des témoins de laction glaciaire : reliefs particuliers, existence de vallées sans eau apparente, nombreux blocs erratiques, paysages « moutonnés », traces de moraines, dépressions humides....
(Vers la carte de de cette région)
1) Les vallées « sèches »
Le trajet des glaciers na pas toujours emprunté les couloirs naturels de vallées déjà formées. Au maximum de la glaciation, ou lors dune crue glaciaire, les masses les plus élevées pouvaient déborder latéralement et constituer un bras supplémentaire. Cette division en deux ou plusieurs bras porte le nom de diffluence. Cette expansion latérale pouvait rejoindre une autre langue glaciaire en position inférieure. Il est possible didentifier encore de nos jours de tels passages qui constituent des vallées sans rivière ou vallées
mortes. On peut en signaler deux.
De Cheyssac au Béal dAntignac : (photo
01) ce passage en dépression est emprunté par la voie ferrée Bort-Neussargue ; il est caractéristique de laction dune langue glaciaire venant de la Rhue, probablement par débordement, et rejoignant le glacier de la Sumène.
Un autre exemple se situe entre Saint-Thomas et La Baraquette. La route Clermont-Aurillac emprunte cette autre vallée actuellement sèche qui faisait communiquer le glacier de la Rhue et la dépression de la Sumène à proximité de Saignes. Sur ce parcours, le trajet du glacier devait suivre, au moins sur une partie du trajet, un relief à contre pente ce qui est souvent observé sur le profil longitudinal dune vallée glaciaire.
2) Les chenaux dévacuation.
Ils se sont formés en fin de période glaciaire, lors dune fusion importante de glace. A proximité de Cheyssac un tel chenal peut être observé en gagnant le village de Rochemont situé sur la crête séparant les deux vallées : Rhue et Sumène. La route qui conduit au village emprunte un thalweg caractéristique, qui remonte en amont à proximité du village donc en un point culminant. Cette entaille ne peut recevoir de plus haut un agent dérosion. Actuellement elle ne montre aucun signe de vitalité et un petit filet deau plus nettement visible dans sa partie inférieure, peut être reconnu. La meilleure hypothèse est dadmettre lexistence dune masse de glace qui en se retirant (en fondant) à été à lorigine du torrent de Rochemont. Ainsi ce ravin disséquant le flanc dune crête représente le travail dun ancien glacier, plus précisément, un diverticule latéral du glacier de la Rhue.
Un autre exemple peut être décrit au nord-est du château de Couzans en descendant de Fouliade vers Druls. Après avoir rejoint la route D 49 le trajet longe le flanc droit dune vallée fluviatile parfaitement caractérisée. Cette vallée a un dénivelé proche de 110 m, de 620 m à son origine jusqu'à 510 m à son confluent avec la rivière Le Soulou. Cette entaille représente le résultat de laction fluviatile lors de la fonte des glaciers et constitue un chenal dévacuation.
Ces petites vallées ont probablement été initiées par le débordement glaciaire en un point bas dune ligne de crête ; puis lérosion glaciaire a amorcé dun chenal ; ensuite, les chenaux ont été fortifiées par lérosion fluviatile provenant de leau de fonte. Ces vallées sont toutes orientées N>S indiquant le trajet dune masse de glace en cours de fonte vers une zone basse déjà dégagée et par conséquent moins importante. Cette disposition constitue un argument pour orienter la diffluence (ou débordement) de la Rhue vers la Sumène. A un moment donné de lhistoire respective des deux vallées, le niveau des glaces était, en limite sud de lArtense, supérieur à celui du bassin de la Sumène.
3) Les blocs erratiques
On désigne sous ce terme des blocs de roche qui nappartiennent pas au site sur lequel ils reposent ; ils y sont amenés par le transport glaciaire. Une preuve du transport de ces blocs peut être acquise par comparaison de la nature des blocs avec celle du substrat. Lorsque les blocs ont été transportés, leur nature ne correspond plus à celle du substrat. Ce nest pas toujours vrai et dans certains cas la preuve de la nature erratique dun bloc est difficile à acquérir. Si par exemple le substrat, homogène sur une longue distance, est recouvert dune langue glaciaire, un transport de blocs de même nature que le substrat peut se produire sans que, pour autant, le substrat change de nature. Dans ce cas la preuve du transport peut être apportée en sassurant que le bloc en question nest pas un éboulis (absence de falaise à proximité), quil nest pas en continuité avec le substrat et quil est de taille suffisamment importante pour ne pas avoir été déplacé par lhomme.
Le secteur de Cheyssac est très riche en blocs erratiques : ils sont situés, pour les plus spectaculaires, dans le triangle limité par les carrefours de Cheyssac, Le Béal et Pourcheret.
Quatre rochers sont observables : à 100m du carrefour de Cheyssac sur la route de Saignes
(photo 04), (photo
05)
; -à 400m du carrefour de Cheyssac sur la route dAntignac, à hauteur du hameau Le Clos à droite en direction des habitations
(photo 02) , (photo
03)
; dautres blocs sont encore visibles au débouché de la route de Champs sur la transvolcanienne, à gauche en direction de Riom-ès-Montagnes .
(Vers la structure des roches constituant les blocs erratiques et le substratum.)
Dans les zones les plus basses, les blocs sont moins visibles ; après leur dépôt ils ont été ensevelis par les formations dites fluvioglaciaires, représentées par les matériaux transportés par les glaciers puis repris par les cours deau. Un exemple particulièrement spectaculaire est constitué par un bloc de basalte
(photo 12) mis à jour lors de lextension du cimetière de Vebret. Ce bloc témoigne par sa forme quasi sphérique dun roulage sur une grande distance. Il mériterait dêtre mis en évidence en un lieu moins confidentiel.
4) Les paysages avec roches moutonnées
:
Les roches moutonnées présentent un aspect caractéristique qui permet de reconnaître le sens de déplacement du glacier. Le relief du côté amont, bord d’attaque du glacier est lisse, émoussé à faible pente, alors que le côté aval est plus abrupte, plus chaotique et le poli moins
marqué (photo 08). La région de Verchalles est caractéristique à cet
égard (photo 10) (photo
11).
5) Les roches striées :
Lors de son lent déplacement le glacier n’est pas inactif. Les blocs de roche entraînés sous la glace constituent la moraine de fond. Par leur mouvement, ces débris provoquent une abrasion énergique de la roche en place, d’où l’apparition de stries. En fonction de la dureté relative des roches, ce peut être le contraire et ce sont alors les blocs transportés qui sont striés.
D’autres témoins de l’activité glaciaire peuvent aussi être signalés. Paradoxalement, les clôtures anciennes constituées de blocs de pierre plus ou moins arrondis sont aussi des témoins glaciaires. Ces blocs, mis en place au sein d’une pâte hétérogène, la matrice, constituaient à l’origine une ancienne moraine ou le résultat d’un épandage fluvioglaciaire. Les blocs les plus superficiels ont été rassemblés par les hommes et accumulés en murettes ou en amas circulaires. (photo
06) , (photo
07) , (photo
09)
En résumé, sur le territoire de la commune de Vebret, sest produit le contact de glaces dorigines géographiques différentes : dune part les glaces venant de lest, (approximativement la région de Riom) et dautre part les glaces accumulées au nord de la Rhue, formées dans le grand amphithéâtre constitué par les Monts
Dore et le Cézallier. La plus grande partie se dirigeait vers la Dordogne mais le barrage constitué par la colline phonolitique de Bort, a entraîné une accumulation puis un débordement vers le sud. La confluence des glaces provenant de ces deux directions est encore reconnaissable à proximité de Cheyssac et de
Verchalles.
(Vebret, août 2003)
Un glacier à 450 m daltitude : Est-ce possible ?
Un glacier ne peut se former et persister dune année à lautre quau-dessus de la limite inférieure des neiges permanentes. En revanche sa partie terminale peut se situer au-dessous de cette altitude. Actuellement dans les Alpes, le glacier des Bossons se termine vers 1300 m daltitude alors que laltitude des neiges persistantes est proche de 2800 m. Laccumulation de glace en un point donné dépend de deux phénomènes indépendants jouant en sens inverse : 1 : lalimentation qui dépend de la distance à la source (le cirque glaciaire) et du relief qui supporte la glace ; le profil plus ou moins prononcé de ce relief entraîne une vitesse variable du déplacement de la glace ; 2 : la disparition par fusion qui dépend de la température ambiante. Les combinaisons de ces deux séries de facteurs peuvent être nombreuses et certaines aboutissent au même résultat ; ainsi une fusion réduite combinée à une alimentation réduite peut avoir le même résultat quune fusion élevée compensée par une forte alimentation : dans les deux cas il y a conservation de la masse de glace et une zone relativement basse peut être englacée.. |
Version Avril 2004.
légendes des I L L U S T R A T I O N S
Fig.1. Une vallée morte entre Cheyssac et Le Béal (hameau situé entre Couchal et Antignac). Cette dépression empruntée par la voie de chemin de fer reliant Bort-Les-Orgues à Riom-ès-Montagnes, représente lancien trajet dune langue glaciaire orientée grossièrement NO-SE. Cette vallée correspond soit à une diffluence du glacier de la Sumène vers le Nord-Ouest, soit à une diffluence prenant son origine dans la partie terminale du glacier de la Rhue, à proximité de Saint-Thomas, en direction de la Sumène. La direction probable correspond à cette dernière hypothèse ; nous le montrerons plus tard. Cest maintenant une vallée sans écoulement. Son tracé est parfaitement visible en direction des premières maisons situées au nord de Couchal. (12/2001).
Fig. 2. Les blocs erratiques du secteur de Cheyssac. Site en direction dAntignac, à hauteur du hameau Les Clos, à droite en direction des habitations.
Fig. 3. Les blocs erratiques du secteur de Cheyssac. Site en direction d’Antignac, à hauteur du hameau Les Clos, à droite, en direction des habitations. Une recherche est actuellement en cours pour savoir si les parcelles ont reçu un nom en relation avec la présence de ces blocs.
Fig. 4. Les blocs erratiques du secteur de Cheyssac. Site en direction de Pourcheret, à 100m du carrefour de Cheyssac.
A comparer avec la figure suivante. Les deux illustrations correspondent à des blocs de nature bien différente.
Ce bloc est de nature basaltique ; sur la Fig. 5 les blocs sont de nature métamorphique.
Fig. 5. Les blocs erratiques du secteur de Cheyssac. Site en direction de Pourcheret, à 100m du carrefour de Cheyssac. A comparer avec la figure précédente. Les deux illustrations correspondent à des blocs de nature bien différente. Alors que sur la Fig.4, le bloc unique est de nature
basaltique, sur la Fig. 5 les blocs sont de nature métamorphique. Ces blocs (Fig. 4 et 5) sont situés dans la même parcelle de terrain.
Fig. 6. Les blocs erratiques du secteur de Cheyssac. Site en direction de Saint-Thomas, au niveau du col Sumène-Rhue, à lest de la route. Remarquer
dune part les blocs de petite taille anciennement accumulés par lhomme au pied dun arbre et dautre part, à la lisière de la haie, dautres blocs de plus grande taille récemment déchaussés à laide dun matériel mécanique puissant ; détail donné en Fig.7. (Fig.6 : 3/2002).
Fig.7. Les blocs erratiques du secteur de Cheyssac. Site en direction de Saint-Thomas, au niveau du col Sumène-Rhue, à l’est de la route. Détail de la figure précédente (10/2002).
Fig. 8. Les blocs erratiques du secteur de Cheyssac. Site en direction de Champassis, au sud de la route trans-volcanienne. Ici trois étapes sont reconnaissables dans la transformation du paysage observé à microéchelle. Le sommet du suc en dos de tortue témoigne de l’action du glacier qui a émoussé le relief. Ce suc représente une petite fenêtre d’observation de la roche en place. A gauche les blocs de petite taille (20-40 cm) témoignent d’un premier épierrage à la main. Le bloc le plus clair déposé au sommet, représente un nettoyage récent et plus complet du terrain réalisé à l’aide d’un matériel mécanique (3/2002).
Fig.9. Secteur de Cheyssac. Site en direction de Champassis, au sud de la route trans-volcanienne. Transformation ultime du paysage glaciaire par l’homme avec suppression des murettes pour l’agrandissement des parcelles (3/2002).
Fig. 10. A proximité de Verchalles Soubro. A remarquer quelques blocs erratiques et surtout les surfaces du socle à nu.
Fig. 11. A proximité de Verchalles Soubro. Les dépressions humides, les sagnes caractérisent aussi le relief glaciaire. Photographie prise à faible distance, moins de 500 m, de la précédente.
Fig.12. Le bloc de basalte du cimetière de Vebret. Mis à jour lors du terrassement de la seconde partie de ce cimetière ; altitude par rapport à la rivière : 12 m daprès IGN ; diamètres selon trois axes : 1, 1, et 1,6 m, volume approximatif : 1,6 m3 ; poids approximatif : entre 2 et 3 t.